Le RITM et le CREFE proposent, le Jeudi 15 Juin, un séminaire commun sur la relation d’agence : « La relation d’agence au prisme de la (dé) loyauté » (voir introduction ci-dessous). Le sujet sera traité sur la base de quatre interventions de membres du CREFE, Universitaires et/ou professionnels.
13h30 : G. HIRIGOYEN – Ph. GILLET : Qu’est que le CREFE ? – Le CREFE et le RITM (10’)
13h45 : M.COULARDEAU : La théorie de l’agence confrontée à la pratique des fusions-acquisitions ; (20’ + questions 10’)
14h15 : V.TANDEAU DE MARSAC : Déclinaison du conflit d’agence dans les entreprises familiales ; (20’ + questions 10’)
14h45 : Y.FENG : Confucianisme : loyauté de l’agent et confiance du principal ; (20’ + questions 10’)
15h15 : G.HIRIGOYEN : La relation d’agence : l’approche par la psychologie sociale. (20’ + questions 10’)
15h45 : CONCLUSION : 10’
La relation d’agence au prisme de la (dé) loyauté
L’origine de l’étude de la relation d’agence et des questions qu’elle soulève est située en général dans les réflexions d’A.SMITH (1776) sur l’inefficacité des sociétés par actions dont la direction est confiée à un agent non propriétaire qui ne serait pas incité de ce fait à gérer au mieux les affaires qui lui sont confiées.
Cette séparation sera d’autant plus préjudiciable aux propriétaires que la dilution du capital de la société sera importante. Les travaux de Berle et Means (1932) ont ainsi mis en évidence que le contrôle managérial permet aux dirigeants de léser les intérêts des actionnaires. Comme ils l’analysent, bien antérieurement aux théoriciens de l’agence, actionnaires et dirigeants ne sont alliés qu’en apparence. Les premiers désirent que l’entreprise crée le plus de richesse financière possible, alors que les seconds peuvent rechercher, par exemple, à accroître leur prestige et leur pouvoir en augmentant la taille de l’entreprise qu’ils gèrent, même si cela conduit à entamer la création de valeur financière. Deux logiques s’affrontent : celle qui veut que le propriétaire du capital de l’entreprise soit aussi celui qui la dirige ; et celle, qui entend que lorsque le nombre des actionnaires est trop important et les enjeux trop complexes, une classe de dirigeants professionnels apparaisse, qui géreront ces nouvelles bureaucraties privées (O’Sullivan, 2000). C’est en réaction à ce primat des dirigeants contre les actionnaires que s’est développé le courant contractualiste.
La vision contractuelle de la firme conduit à étudier l’engagement des individus dans l’exécution des contrats qu’ils passent entre eux et particulièrement lorsque le contrat prévoit la délégation d’un ensemble de décisions. Ceci est assimilable à un transfert de droits ; ce transfert est une relation d’agence. Comme l’écrit S.Ross (1973), une « relation d’agence s’est créée entre deux ou plusieurs parties lorsque l’une de ces parties désignée comme l’agent, agit comme représentant de l’autre désignée comme le principal, dans un domaine décisionnel particulier”.
Dès lors qu’il y a transfert (contractuel) de la prise de décision, il y a relation d’agence. Dans leur célèbre article de 1976, Jensen et Meckling définissent la relation d’agence comme « un contrat dans lequel une ou plusieurs personnes ont recours aux services d’une autre personne pour accomplir en leur nom une tâche quelconque, ce qui implique une délégation de nature décisionnelle » (p 308). Cette définition est plus large et plus générale que celle de Ross et recouvre en fait « toute relation entre deux individus telle que la situation de l’un dépende d’une action de l’autre » (p 309). Le contrat est la relation d’agence et tout contrat recèle en lui une telle relation. L’individu qui agit est l’agent, la partie affectée est le principal ; Pratt et Zeckauser (1985) parlent ainsi de relation principal/agent.
En économie financière néo-classique, l’individu sous-jacent à la relation d’agence est celui d’un acteur rationnel qui cherche à maximiser son utilité individuelle avec la moindre dépense possible. Ce qui dans son acception classique ne signifie rien d’autre que la propriété de satisfaire un désir individuel quelconque. Est utile, en ce sens, tout ce qui est ici et maintenant désirable. Même le nuisible et le superflu et, au sens courant « l’inutile ».
Inspirée par les travaux de J.Bentham (1789), l’utilité en économie est émancipée de toute philosophie morale et de tout jugement moral.
L’égoïsme et la recherche de l’intérêt personnel conduisent l’individu à adopter un comportement opportuniste qui l’amène à ne pas respecter les engagements contractuels, à la tricherie. Cet opportunisme qualifié de post-contractuel par Alchian et Woodward (1988) conduit au problème dit du risque moral (moral hazard). Cette hypothèse de déloyauté de l’agent vis-à-vis du principal a été actée dès le départ par A.Smith (1776) ; celle-ci n’ayant comme on l’a précédemment noté, aucune connotation amorale.
La finance traditionnelle s’inscrit dans cette vision restrictive de la relation d’agence fondée exclusivement sur la déloyauté et l’opportunisme de l’agent. Une perspective comportementale suppose l’adoption d’une approche généralisée au sens de Ross (1973) et nécessite de considérer tout à la fois des agents insuffisamment et excessivement loyaux. Cette dernière hypothèse est celle retenue par la psychologie sociale.
Le principal au sommet de la hiérarchie, prend des décisions et les agents, dans des positions inférieures, exécutent ou non les ordres. Pour promouvoir l’obéissance, les agents ont un devoir de loyauté à l’égard du principal. Les agents dans des positions subalternes doivent obéir à leur chef hiérarchique et le dirigeant doit obéir aux actionnaires.
La conférence s’organisera en deux parties qui reprendront respectivement chacune des perspectives envisagées. La première partie analyse la relation d’agence dans une approche financière. Elle se décline sous deux formes, La théorie de l’agence, qui traduit l’égoïsme du dirigeant et la méfiance des actionnaires (A) ; le confucianisme, qui traduit une loyauté et une confiance réciproques des acteurs (B).
La seconde partie propose son approfondissement et sa généralisation par la psychologie sociale.
Elle suppose que trois points soient examinés : la soumission à l’autorité : l’excessive loyauté de l’agent (A) ; les dangers d’une excessive loyauté de l’agent (B) et les voies de désengagement de l’état agentique : exit, voice and neglect (C).
Quatre intervenants pour traiter de ces différentes questions :
– Michaël COULARDEAU,
– Yuan FENG,
– Gérard HIRIGOYEN,
– Valérie TANDEAU DE MARSAC.