Tel est l’intitulé du programme de recherche porté par Bertrand Sergot, Denis Chabault et Elodie Loubaresse. Ce programme de recherche est accompagné et financé à hauteur de 56 000 euros sur la période 2014-2017 par le Forum Vies Mobiles, un institut autonome de recherche et d’échanges sur la mobilité soutenu par la SNCF. Il étudie la mobilité à la fois comme franchissement de l’espace physique et comme changement social. Il cherche à observer les modes de vie et leur déploiement sur le territoire grâce aux transports et aux télécommunications et à anticiper leurs transformations (pour plus d’informations, voir : http://fr.forumviesmobiles.org/). Il s’est doté d’un comité d’orientation transdisciplinaire de haut niveau composé de praticiens du transport, d’artistes et de chercheurs en sociologie, géographie, urbanisme, philosophie… spécialistes des questions de mobilités spatiales. Le programme de recherche « les organisations comme régulatrices de mobilités différenciées » vise à compléter les axes de travail du Forum dans le champ des sciences de gestion.
Les mobilités dans l’espace géographique constituent depuis longtemps un objet de recherche reconnu en gestion, notamment en gestion des ressources humaines. Les recherches existantes tendent toutefois à se concentrer exclusivement sur l’étude des mobilités spatiales à l’échelle d’individus au travail ou de populations particulières d’individus au travail. Dans ces conditions, l’objectif général du programme de recherche est de dépasser ces niveaux d’analyse usuels afin d’analyser dans quelle mesure et comment les organisations, et plus particulièrement les entreprises, sont à même de générer et d’orchestrer, en leur sein mais aussi dans leurs relations avec leurs partenaires extérieurs, des ensembles différenciés de mobilités et d’immobilités dans l’espace géographique (voir aussi Sergot et al., 2012). A cette fin, la réflexion s’appuie sur la combinaison, d’une part, de la littérature riche mais fragmentée produite en sciences de gestion sur les mobilités spatiales, en particulier en GRH et en théorie des organisations, et, d’autre part, des principaux enseignements du new mobilities paradigm. Le new mobilities paradigm est un cadre d’analyse en cours de structuration qui a émergé ces dernières années, principalement en sociologie et en géographie humaine (Cresswell, 2010 ; Kaufmann, 2002 ; Urry, 2007) et qui vise à permettre d’analyser les phénomènes sociaux contemporains sous l’angle des mobilités spatiales. Un de ses apports les plus prometteurs pour le présent programme réside dans sa volonté de centrer l’analyse sur les interdépendances existant entre différentes mobilités spatiales (distinguées par la nature de leurs objets – individus, biens physiques et/ou informations -, par leurs échelles spatiales et/ou leurs temporalités), ainsi que les interdépendances existant entre mobilités et immobilités spatiales.
La partie empirique du programme de recherche est subdivisée en trois axes étroitement liés entre eux :
- Le premier axe a pour objectif de comprendre comment les entreprises gèrent leurs salariés mobiles travaillant au moins en partie hors de leurs locaux permanents. Il s’agit notamment d’étudier les tiers lieux et autres espaces de co-working afin d’identifier les modes et moyens de coordination et de contrôle organisationnel des salariés pendulaires qui les fréquentent, ainsi que les interactions de ces salariés avec leur environnement immédiat.
- Le deuxième axe vise à explorer, au travers de l’étude de décisions de restructuration mises en œuvre par des entreprises du secteur de l’agroalimentaire, comment les discours de valorisation ou de dévalorisation de certaines des mobilités spatiales associées à ces restructurations participent à leur légitimation et/ou à leur délégitimation, facilitant ou contraignant (selon les cas) ainsi les opérations de restructuration.
- Le troisième axe du projet étudiera les mobilités spatiales, leurs modalités de différenciation et leurs enjeux tant pour les individus que pour l’organisation concernée. On s’intéressera notamment aux interactions entre mobilités et RSE, afin de voir dans quelle mesure la dimension responsable des mobilités est prise en compte dans leur orchestration organisationnelle.
Les porteurs du programme sont ouverts à toutes les propositions de collaboration de chercheurs du RITM qui permettraient d’accroître la qualité d’ensemble dudit programme.
Références bibliographiques
Cresswell, T., 2010, “Mobilities I: catching up”, Progress in Human Geography, 35: 4, 550-558.
Kaufmann, V., 2002, Re-thinking Mobility. Farnham, UK: Ashgate, Collection Transport and Society.
Sergot, B., D. Chabault et É. Loubaresse, 2012, “Mobilités spatiales et dynamiques organisationnelles”, Revue Française de Gestion: 7, 77-90.
Urry, J., 2007, Mobilities. Cambridge, UK Polity Press.